Réflexions sur une production verte.

Une autre production est-elle possible ?

La production dans l’histoire

Marx considérait la production créatrice de richesse comme le résultat de l’interaction entre le travail et le capital. À l’époque, le capital était compris dans un sens économique, c’est-à-dire qu’il se référait aux moyens de production. Cependant, si à l’heure actuelle nous avons tendance à penser que l’argent est l’élément essentiel pour réaliser la production, nous ne devons pas oublier l’importance des machines.

Comment fonctionnent ces machines ? Elles s’alimentent principalement à l’énergie, et en France, comme dans la plupart des pays, cette énergie est fournie à 70 % par des sources d’énergies fossiles.

Selon Jean-Marc Jancovici, président du Shift Project depuis 2010, la production de richesse et donc la croissance sont liées à l’utilisation des énergies fossiles. Appuyé par les recherches entamées dès le XIXe siècle par Charles Dupin, cet ingénieur s’attache à démontrer le lien entre l’augmentation de l’utilisation du charbon, du pétrole et du gaz et la croissance mondiale.

Graphique de Alain Grandjean montrant l’évolution du PIB en fonction de l’utilisation des énergies et notamment du pétrole.

L’exploitation de ces ressources naturelles est l’une des principales causes du dérèglement climatique. Leur utilisation entraîne la libération de gaz à effet de serre et la contamination de l’air, de l’eau et des sols. Cela nous amène à nous demander si la croissance et la production sont synonymes de destruction ?

Cette question peut sembler naïve, mais elle est pertinente : qu’est-ce que produire de l’énergie ? La définition physique de l’énergie est une force de transformation de son milieu. Donc, produire de l’énergie peut être interprété comme une destruction à l’origine d’une création.

Cette création de richesse est devenue objectivement insoutenable, en raison de l’augmentation de la production actuelle qui se base sur des méthodes très carbonées. On peut en conclure que la croissance finira par s’arrêter et décroître, que ce soit par choix humain ou en raison de la raréfaction des ressources non-renouvelables.

La croissance négative entraîne une baisse du PIB et une diminution de la richesse. Cette situation n’est pas socialement acceptable et peut avoir des conséquences désastreuses pour nos sociétés modernes, en suscitant des mouvements de contestation.

Perspectives

Comment peut-on penser ce fait et envisager une perspective politique, au sens grec du terme, c’est-à-dire une façon de vivre en société ?

Il est essentiel de prévoir et de mettre en place une stratégie claire pour préserver la survie de nos sociétés. Nous devons collectivement déterminer ce qui est essentiel et prioriser l’allocation des ressources pour assurer une légitimité de la démarche. Cela implique de renoncer à ce qui n’est pas nécessaire à notre vie et de transformer les méthodes de production pour s’assurer l’approvisionnement de ce qui est essentiel.

En réorientant nos modèles de production vers des méthodes artisanales, nous pourrions mettre en avant des savoir-faire anciens qui sont peu dépendants des ressources fossiles. Ces méthodes, en vogue bien avant l’invention de la machine à vapeur qui a marqué le début de l’industrialisation au XVIIIème siècle, se concentraient sur des produits considérés comme essentiels. Ce changement de paradigme économique pourrait être un projet d’avenir très intéressant.

Bien sûr, voir l’artisanat comme une solution ne suffit pas pour relever les défis environnementaux auxquels nous sommes confrontés. Il est essentiel de rechercher et de promouvoir d’autres sources d’énergie écologiques telles que l’hydrogène vert et le géothermique pour s’assurer que les secteurs clés continueront à produire à leur niveau actuel.

Cependant, au-delà de ces solutions, la question finale qui demeure est la suivante : aurons-nous la volonté politique de changer ? L’avenir nous le dira.

Annexes :

Article : Les liens entre PIB et énergie dans une trajectoire à +2°C, par Alain Grandjean et Marion Cohen dans Chronique de l’anthropocène, avril 2017.

Cour : CO2 ou PIB, il faut choisir, Jean-Marc Jancovici à Science Po, aout 2019.

Livre : Software Craftmanship, the new imperative, Pete McBreen, 2001

Livre : Das Kapital, Karl Marx, 1885.

Travaux: Energy, environment and sustainable development, Abdeen Mustafa Omer, 2007.

Pour découvrir un autre sujet : https://fratisanat.fr/comment-sauver-la-france-en-1-etape-industrie/

 

 

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